Economie

Scor : un rendement sur le cycle qui questionne le montant de dividendes

Les résultats et le RoE de Scor ne lui permettront pas de tenir sa politique de dividendes actuelle dans la durée. Une amélioration structurelle du résultat délivré sur le cycle est nécessaire pour que la capitalisation de Scor reprenne une dynamique positive.

Comme elle nous y avait habitué, Scor a présenté cette année un rendement normalisé de bon niveau, à 10,6%. A l’instar des années précédentes, l’objectif (800 bp au-dessus du taux sans risque), est atteint : 10,4% en 2016 ;  10,1% en 2017 ; 9,4% en 2018 ; 9,0% en 2019 et, donc, 10,6% en 2020.

RoE normalisé et RoE effectif

Malheureusement, il s’agit du taux de rendement normalisé. Le taux de rendement effectif, celui qui inclut le coût réel des catastrophes, l’activité fondamentale d’un réassureur, connaît une chronique nettement divergente : 9,5% en 2016 ; 4,5% en 2017 ; 5,5% en 2018 ; 7 % en 2019 et 3,8 % en 2020.

Ainsi, sur les cinq dernières années, donc depuis que Scor a choisi de mettre en avant le taux de rendement normalisé, cet indicateur censé mesurer la moyenne sur le cycle est systématiquement supérieur au taux de rendement effectif.

En moyenne, il s’élève à 9,9 %, contre 6,1% pour le taux de rendement effectif.

ROE normalisé vs. ROE réel

Or, le taux de rendement normalisé est un indicateur théorique. Le RoE effectif, qui correspond au résultat net délivré, est ce qui, dans la durée, détermine le montant de dividendes distribuables et de fonds propres accumulés, donc la capacité de croissance du cours.

La question du dividende

Scor a optimisé son capital et est bien plus léveragée que ses concurrentes, avec un ratio de dette financière sur fonds propres IFRS de 42 % en moyenne entre 2017 et 2019 (Scor a pris le parti de communiquer sur le ratio d’endettement prudentiel, qui prend notamment en compte les perspectives de profits futurs), là où les principaux acteurs européens oscillent entre 12 % et 25 % (ce taux étant atteint par Swiss Re et Hannover Re, Munich Re, moins optimisée que ses trois concurrentes, se situant quant à elle à 13%).

L’écart de prise de risque associée est d’autant plus significatif que les réassureurs sont structurellement exposés à des chocs violents. Dans ce contexte, avec un tel niveau de levier, les investisseurs se doivent d’être plus exigeants avec Scor qu’avec ses concurrents. Or le RoE de Scor est plus faible que celui de ses concurrents. A titre d’exemple, Munich Re et Hannover Re, les principaux acteurs de la zone euro, ont respectivement délivré un ROE de 6,4% et 12,1% sur la période 2017-2019, contre 5,6% pour Scor.

Dans une certaine mesure, le dividende est un moyen de faire patienter les investisseurs, d’acheter un répit temporaire. Sans doute est-ce pour cette raison que Scor s’est endettée afin de pouvoir servir, en 2018 et 2019, un dividende supérieur au résultat au titre de 2017 et 2018. Et si, en 2020, le gel généralisé des dividendes avait permis à Scor de reconstituer quelques réserves, elle annonce de nouveau, en 2021, un dividende de 336 millions d’€, en ce compris 1,80 € par action pour un montant total de 186,73M d’actions, supérieur d’environ 100M€ à son résultat, qui n’est quant à lui que de 234 millions d’euros.

Cela est-il viable dans la durée ?

Un niveau de dividende est appréciable s’il est pérenne. Un RoE normalisé est utile s’il donne une indication non biaisée sur le cycle. Mais le juge de paix de la performance d’une entreprise dans la durée est le RoE. De ce point de vue, Scor semble sous-performer depuis maintenant quatre à cinq ans. Espérons que le niveau très élevé de distribution de dividendes n’obère pas ses capacités à se relancer.

C’est une condition nécessaire pour que le cours de l’action Scor puisse atteindre l’étiage des 43 € proposés par Covéa  il y a maintenant 2 ans, voire des 50 € alors promis par Denis Kessler.